Discours de Michèle Crastes, première adjointe

Il a suffi d’un seul coup de feu tiré à Sarajevo le 28 juin 1914, pour que tout s’enclenche alors, tout s’enchaîne dans un bruit assourdissant de mécanique bien huilée, d’alliances en alliances, de mobilisations générales en mobilisations générales, d’ultimatums en ultimatums, et l’Europe s’est enflammée sous le lourd soleil des moissons, dans un même élan.

Ce que le Poilu a vécu est indicible. Les obus, les mitrailleuses, les gaz l’ont fauché dans sa jeunesse mais il a tenu jusqu’à la victoire. Voilà pourquoi, Poilu, nous sommes ici en ce jour d’armistice, rappelant la mémoire vivante de tes combats, de tes souffrances, de tes sacrifices.

Plus d’un siècle, quatre générations d’hommes nous séparent de ces événements tragiques et glorieux à la fois. Aujourd’hui l’Europe s’est heureusement réconciliée avec elle-même, les ennemis d’hier sont devenus des alliés fidèles et de solides partenaires.

Le onzième jour du onzième mois à la onzième heure les armes se taisaient enfin.

C’était le 11 novembre 1918. A vous tous, réunis ce matin, je souhaite exprimer combien votre présence atteste une nouvelle fois, du très haut intérêt que nous portons à cette cérémonie du souvenir.

Le 11 novembre est le symbole d’une victoire : victoire de la démocratie, mais aussi victoire de la paix sur une désastreuse guerre européenne, entraînant une grande partie du monde dans son malheur.

Soyons conscients de la grande fragilité de nos sociétés dites développées qui ne sont jamais à l’abri d’un possible retour de la barbarie.

Deux guerres mondiales, deux tragédies humaines ont ensanglanté le 20ème siècle, ruiné des vies, anéanti des familles, des peuples entiers, des économies nationales. Aujourd’hui encore des guerres se mènent et d’autres se préparent au nom de la démocratie, en fait toujours pour préserver les intérêts économiques et politiques des puissants de ce monde.

Commémorer le 11 novembre 1918, c’est accomplir notre devoir de mémoire à l’égard de ceux qui nous ont légué les valeurs de courage pour la défense de la nation et de la démocratie mais également celles du pacifisme. C’est aussi espérer, à travers leurs engagements, dans un avenir que l’on veut toujours meilleur et solidaire.

Dans cet esprit, il n’est pas vain, d’associer au souvenir du 11 novembre, les batailles quotidiennes pour combattre sans relâche, ce qui divise. L’indifférence, l’intolérance, la xénophobie et le racisme, l’individualisme, le repli sur soi lié à une société qui valorise les plus forts et marginalise les faibles, ce sont les plaies d’aujourd’hui et des ferments de haine pour demain.

Rêvons ensemble du jour où la paix ne sera plus seulement, comme l’écrivait Jean Giraudoux, « l’intervalle entre deux guerres», mais plutôt comme l’avait voulu le philosophe Emmanuel Kant, «une paix perpétuelle».

L’Armistice du 11 novembre est porteur d’un message de paix universelle. Commémorer cet anniversaire c’est lutter chaque jour et partout pour préserver la paix dans le monde. Le plus bel hommage que nous puissions rendre aujourd’hui aux morts de la Première Guerre mondiale, c’est de construire ce qu’ils espéraient mais qu’ils n’ont pas connu : un monde de la réconciliation, un monde social et démocratique, construit pour les peuples et avec les peuples. Incitons nos enfants, nos jeunes à ne pas oublier ce qui s’est passé, encourageons-les à tisser des liens forts avec nos voisins, nos villes jumelées !

 

Je vais maintenant conclure par ce message du dernier vétéran alsacien de l’Armée impériale de Guillaume II, s’adressant aux générations futures : « Soyez les messagers de la paix … Soyez les passeurs de la mémoire de la Grande Guerre, car cette tragédie ne devra jamais être oubliée. Sinon, elle risque de recommencer !« 

Je vous remercie de votre présence autour du souvenir de nos morts tombés pour la France et pour la paix, et vous invite à une minute de silence.